La publication de l’appel «Chantiers
d’Espoir» était initialement prévue le jeudi 8 janvier 2015. Les
attentats de Paris ont bouleversé la situation politique et le pays tout
entier. À l’horreur générée par une telle barbarie a succédé une formidable
mise en mouvement citoyenne. Il importe aujourd'hui que cet élan de
solidarité ne reste pas sans suites: pire, que ce souffle libérateur ne
soit pas anéanti par les préjugés et le racisme dont les musulmans et les juifs
sont au cours de cette période les principales victimes et qui montrent à quel
point la haine et la peur ont été déverrouillées; que le repli sur soi et
la surenchère sécuritaire ne viennent pas étouffer le débat pluraliste, la
liberté d’expression et confisquer la parole citoyenne dans une
société où les injustices et la ségrégation n’ont jamais été aussi
fortes. Les enjeux du vivre ensemble, de la fraternité, de l’égalité et
de la laïcité sont essentiels pour rendre possible une véritable république,
une société plus juste et plus démocratique. Une question a émergé avec force
des rassemblements spontanés qui ont eu lieu: «dans quelle société
voulons-nous vivre?» De ce point de vue le travail envisagé à
travers les «Chantiers d’Espoir» nous paraît plus nécessaire que
jamais.
«Chantiers» parce que nous voulons construire une
alternative. «Espoirs» parce que nous sommes convaincus, chacune et
chacun, forts de la diversité de nos engagements et points de vue, que cette
alternative est possible.
Cet appel et le processus qu'il initie sont nés de l'urgence de
reconstruire une perspective commune face aux inégalités qui explosent, à la
stigmatisation, au déclassement et à l'abandon organisé de franges entières de
la population...
Comment un Président élu avec la force de 17 millions de voix a-t-il pu
mettre en œuvre une politique qu’il dénonçait hier? Comment une partie de
la gauche, qui affirmait pourtant un idéal de changement, de progrès social et
de justice, a-t-elle pu à ce point tourner le dos aux exigences qui l'ont
portée au pouvoir?
Pour nous, cette sidération s’est transformée en colère. Une colère qui
s’est exprimée par de multiples mobilisations sociales portées par des
associations, des syndicats, des partis ou des collectifs. Pour d’autres, cette
sidération s’est traduite par un désintérêt de la politique et l’abstention, ou
pire encore par un vote de repli et de haine.
Nous refusons de laisser les responsables politiques au pouvoir mener notre
pays dans le mur. Nous refusons le «il n’y a pas d’autre solution
possible» qui sert de prétexte à tous les renoncements. Cette impasse de
la soumission renforce le poids des idées de régression, galvanise le
Medef, accélère le retour d'une droite revancharde et place l’extrême droite au
cœur du débat de société. Nous refusons la logique libérale et productiviste
qui détruit nos vies, enferme des millions de gens dans le chômage et la
précarité et menace l’avenir de la planète.
Nous croyons aux valeurs d’égalité, de justice et de solidarité dont la
gauche a été porteuse historiquement. Nous voulons agir pour redonner goût à la
citoyenneté, à la fabrication de la politique et de la démocratie, et inventer
les contours d’un projet émancipateur du XXIe siècle.
Nous pensons que le temps est venu que les hommes et femmes de bonne
volonté, convaincus qu’il est possible et nécessaire de changer le réel,
prennent la parole. Membres ou pas d’une association, d’un syndicat ou d’un parti
politique, nous pouvons, nous allons faire renaître l’espoir. Un autre partage
des richesses et des ressources est possible. Une transition écologique est
urgente. L’égalité entre les individus, quels que soient leur sexe, couleur de
peau, origine, religion, sexualité, handicap est une condition de la
démocratie. Des réponses au chômage peuvent et doivent être apportées sans
attendre un hypothétique retour de la croissance. La vie politique peut
s’écrire autrement que par une succession d’affaires financières et juridiques
qui détériorent toujours plus l'action publique. Il est temps de construire une
démocratie «vraie» dépassant la monarchie élective de la Ve république
pour se réapproprier la souveraineté populaire, lui offrir de nouvelles formes
d’expression, et créer des institutions qui permettent la participation
effective de toutes et tous aux affaires qui les concernent.
Nous voulons dépasser la résignation et proposons d’échanger pour
construire ensemble un autre chemin collectif. Un chemin dans lequel le progrès
humain sera possible pour nous, pour les générations futures.
Nous mobiliser, ensemble, pour élaborer une alternative politique, sociale
et écologiste : c’est l’objet des chantiers d’espoir que nous vous
proposons de construire. À travers ce rassemblement inédit, l’objectif est de
mettre en mouvement nos concitoyens et bâtir ainsi une majorité d’idées dans le
pays, de montrer qu’il est possible de faire autrement en dessinant les mesures
urgentes de transformation sociale et écologique que mettrait en œuvre un
gouvernement qui ne renonce pas face à la finance.
Dans cette perspective, nous proposons de susciter des rencontres, partout
en France, pour tracer un nouveau chemin. Des rencontres, connectées, pour
échanger et inventer ensemble le projet et la stratégie à mettre en œuvre pour
mettre un coup d’arrêt à l’avancée de la droite et de l’extrême droite. Et de
redonner des couleurs, de la saveur et du tranchant aux valeurs d’égalité et de
liberté, de faire émerger une alternative à gauche porteuse d’une politique,
citoyenne, féministe, écologiste et solidaire.
Pour signer l'appel: www.chantiersdespoir.fr
Parmi les 500 premiers
signataires de l'appel, Annie Ernaux (écrivaine) et Robert Guédiguian (cinéaste), Jean Auroux,
ancien ministre du travail, Annick Coupé, syndicaliste, Jean-Pierre Dubois,
militant des Droits de l’Homme; Caroline De Haas, militante féministe; les
socialistes Frédéric Hocquard et Liem Hoang Ngoc ; Françoise Castex et
Isabelle Attard (Nouvelle Donne); Emmanuelle Cosse et Cécile Duflot (EELV);
Pierre Laurent (PCF), Jean-Luc Mélenchon (PG) et Clémentine Autain
(Ensemble); les économistes Jean-Marie Harribey et Henri Sterdyniak;
Roland Gori, psychanalyste, Susan Georges, essayiste, Laurent Pinatel, de
la confédération paysanne...
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