Rythmes: qui paiera la facture?

Comme le soulignent les maires, les activités périscolaires proposées dans 
le cadre de la réforme Peillon ne seront ni obligatoires, ni forcément gratuites.
La réforme des rythmes scolaires s’embourbe dans son impréparation. Alors que le décret officiel entérinant le retour à la semaine des 4,5 jours est paru samedi au Journal officiel, le ­débat repart à nouveau. Cette fois, à propos des fameuses «activités périscolaires» qui, finalement, ne seront ni obligatoires ni forcément gratuites.
En effet, la réforme prévoit qu’en échange du mercredi matin, travaillé, les enfants de la maternelle et du primaire voient leurs journées réduites de 45 minutes les ­lundis, mardis, jeudis et vendredis. Ce temps sera remplacé par 45 minutes d’activités périscolaires, assurées par la commune et situées durant la pause de midi ou avant la sortie des classes à 16 h 30. Des activités pour lesquelles le ministère affiche de grandes ambitions : «Les élèves pourront accéder à des activités sportives, culturelles, artistiques qui contribueront à développer leur curiosité intellectuelle et à renforcer le plaisir d’apprendre et d’être à l’école», souligne la rue de Grenelle. Mais derrière le discours, tous les enfants ne devraient pas forcément en bénéficier.
Une école à la carte
Comme l’a rappelé, vendredi, l’Association des maires de France (AMF), juridiquement, ces activités périscolaires sont facultatives et rien n’empêche les communes de les facturer. Pour Philippe Laurent, président (UDI) de la commission finances et fiscalité de l’AMF, ce devrait même être «payant partout», en fonction du quotient familial. Mais «comme les parents n’ont plus à assurer la garde des enfants le mercredi matin, ils feront des économies», argue-t-il. En clair: les 3 heures de périscolaire réparties sur quatre jours seront compensées par les 3 h 30 assurées par l’État, le mercredi matin. Voire.
Interrogé hier, lors de ses vœux à la presse, Vincent Peillon ne nie pas mais estime que le fonds de 250 millions d’euros accordé aux communes qui adoptent la réforme dès 2013 devrait dissuader les collectivités de répercuter la facture sur les parents et permettre de «bien faire les choses». Il omet juste de préciser que ce fonds ne sera pas renouvelé les années suivantes.
Pour beaucoup, cette réforme au financement aléatoire, et dont les élèves ne bénéficieront pas tous de la même manière, va accroître les inégalités. «C’est un gâchis, un renoncement à ce que la réforme soit réussie partout, déplore ­Sébastien Sihr, secrétaire général du SNUipp-FSU, le principal syndicat du primaire. Il y aura des enfants avec la clé autour du cou, qui rentreront chez eux une fois que l’école aura terminé plus tôt.» Même amertume pour François Cocq, secrétaire national à l’éducation du Parti de gauche. «Les enfants nés au mauvais endroit ou (dont les parents) ne payeront pas seront donc mis à la porte de l’école !» s’indigne-t-il, dénonçant un gouvernement «qui troque l’école républicaine contre l’école à la carte, laissant les collectivités se débrouiller face à l’austérité qu’il leur impose».
article de Laurent Mouloud, paru dans l'Humanité du 29 janvier 2013

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