Ecotaxe: soupçons de corruption


De nombreuses questions se posent à propos du contrat signé en 2011 entre l’État et l’entreprise Ecomouv’. Au cœur de ce qui pourrait devenir un nouveau scandale politico-financier, le partenariat public-privé et la rémunération accordée à cette société italienne pour collecter la taxe. Une taxe dont le principe se justifie du point de vue écologique. Le transport ferroviaire paie en effet une partie des infrastructures alors que les transports routiers sont gratuits pour les transporteurs. 
Un certain flou entoure les modalités de l’appel d’offres lancé en 2009, préalable au contrat passé en 2011 entre le gouvernement Fillon et la société Ecomouv’. Un partenariat public-privé (PPP) qui donne à l’entreprise le pouvoir de récolter les fonds engendrés par l’écotaxe. Certains à droite font un semblant de mea culpa, en déclarant qu’«un impôt… doit être collecté par l’État».
Pourtant, le 4 mai 2012, soit deux jours avant de perdre la présidentielle, la droite en a fixé les modalités par décret. Sur un rendement annuel escompté de la taxe de 1,2 milliard, Ecomouv’ touchera 250 millions, 750 millions revenant à l’État et 150 aux collectivités locales. Soit un pourcentage de rémunération de la société privée de 20% sur les recettes, au lieu des 2 à 3% d’usage dans les PPP. Devant les députés, le premier ministre Jean-Marc Ayrault a dénoncé ce procédé et pointé la responsabilité de la droite dans cette affaire.
Pourtant, à gauche comme à droite, il est difficile de feindre la surprise. Dès le 14 février 2013, la sénatrice PCF Évelyne Didier avait alerté le ministre des Transports, sur «le choix de recourir à un PPP au bénéfice de la société Ecomouv’», détaillant scrupuleusement «le retour sur investissement» démesuré qu’elle percevrait.
Mais l’affaire va plus loin, jusqu’à des soupçons de corruption. François-Michel Lambert, député EELV, pointe un possible «scandale d’État», soulignant un lien douteux: le consultant extérieur, la société Rapp Trans AG, «chargée d’aider l’État à évaluer les candidatures» à l’appel d’offres serait aussi «conseiller de la société Autostrade», société mère d’Ecomouv’, dans d’autres projets.
Dès 2011, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, saisi par un concurrent d’Ecomouv’, avait d’ailleurs estimé que «l’impartialité des conseils de l’État n’était pas suffisamment établie». Eva Joly, qui demande une enquête parlementaire en parallèle de celle déjà ouverte par le parquet de Nanterre depuis 2011, juge que le PPP «a été conçu pour produire de l’argent pour le concessionnaire». Elle demande  des comptes aux deux ex-ministres de l’Écologie, Jean-Louis Borloo et Nathalie Kosciusko-Morizet.
En attendant, cette affaire montre toutes les dérives possibles de ce type de partenariat entre le public et le privé. Cela devrait inciter le gouvernement à s’engager dans une maîtrise publique dans le secteur des transports pour favoriser la transition écologique».
 800 millions d'euros. C'est ce que pourrait coûter à l'Etat l'annulation du contrat passé
 avec Ecomouv', contre 200 à 400 millions si elle avait été décidée dès l'été 2012.

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